n°33 - La Garonne, l'autoroute des chauves-souris

Mercredi 2 août 2023

 

Bienvenue sur la trente-troisième édition

des jeudis Natura 2000 Garonne en Occitanie

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La Garonne, l'autoroute des chauves-souris

 

Les chauves-souris sont les seuls mammifères capables de voler activement. Cette mobilité leur permet d’exploiter des territoires pouvant être éloignés de leur gîte. Pour se déplacer, elles utilisent les composantes du paysage comme les linéaires de haies, les lisières, les rivières ou tout élément structurant une trame verte et bleue. La Garonne joue donc un rôle prépondérant pour le déplacement et l’alimentation des chauves-souris, représentant ainsi un maillon essentiel pour leur préservation. Sur le site Garonne en Occitanie, 9 espèces de chauves-souris sont classées au titre de Natura 2000 pour leurs enjeux européens.

 

Cette 33ème édition des  Natura 2000 sera l’occasion de s’attarder sur certaines espèces emblématiques des bords de Garonne et d’approfondir les connaissances vues lors de l’édition n°11 d’octobre 2021.

 

Se nourrir sur la Garonne

 

Plusieurs espèces de chauves-souris dépendent directement des milieux aquatiques car elles se sont spécialisées dans la consommation d’insectes aquatiques ou sur un mode de chasse « à l’épuisette », en utilisant leur uropatagium (membrane alaire située entre les pattes postérieures). D’autres, plus opportunistes, sont capables d’exploiter plusieurs milieux, mais toutes sont purement insectivore. Elles trouvent donc en bordure de Garonne, une ressource riche et variée, liée à la fois au fleuve et à sa ripisylve.

 

 

photo d'un murin de daubenton ©David Aupermann

©David Aupermann

 

La présence de cette ripisylve est essentielle pour un grand nombre d’espèces. Lorsqu’elle est suffisamment dense et mâture (présence d’arbres de gros à très gros diamètres avec des cavités, desécorces décollées…), les chiroptères y trouvent des gîtes d’estivage ou utilisent ces secteurs comme zones de chasse ou comme voie de déplacement. La gestion douce, voire la libre évolution est en ce sens fondamentale pour leur préservation. Avec la fragmentation du territoire et l’artificialisation des sols (urbanisation et agriculture intensive), les populations de chiroptères sont en forte régression. Leurs exigences quant à la qualité du milieu naturel, les désignent comme les témoins d’un environnement équilibré.

©CD31 - Atlas des paysages

 

Quelques espèces emblématiques de la Garonne

 

La préservation et la restauration de l’axe garonnais est donc d’une importance capitale pour le maintien des populations de chauves-souris comme c’est le cas du Murin de Daubenton, de la pipistrelle pygmée ou du Murin à moustaches, espèces emblématiques de la Garonne.

 

  • Le Murin de Daubenton (Myotis daubentonii) est une espèce de chauve-souris commune, fortement liée aux plans d’eau et cours d’eau de faible courant. Ses terrains de chasse principaux sont les étangs, les lacs, les rivières à cours lent, les canaux, les mares et les fossés où il capture les insectes proches de la surface ou posé sur l’eau. Il peut utiliser les arbres creux à proximité de l’eau pour l’estivage mais quasiment toutes les colonies d’été connues sont situées dans des ponts au niveau des joints de dilatation, des corniches ou des évacuations d’eau pluviale. Il peut également y hiberner si les conditions de température et d’humidité de l’air le permette. Dans le cas contraire, c’est dans une cavité souterraine, en compagnie d’une multitude d’autres espèces de chauve-souris qu’il passera la période hivernale. Sa répartition est plutôt homogène en région, où l’espèce est identifiable en chasse ou dans les gîtes d’hibernations souterrains. Néanmoins, de nombreuses colonies ont été décimées ces dernières années suite au rejointement des ponts.

 

     

©Yannick Beucher

 

  • La Pipistrelle pygmée (Pipistrellus pygmaeus) est la plus petite espèce de chauve-souris de France métropolitaine. On la rencontre sur les zones humides et aquatiques bordées d’arbres (étangs, canaux, lacs, cours d’eau) où elle chasse sous la frondaison. Cet habitat est largement présent sur les bordures de la Garonne, ce qui permet à cette espèce d’y être bien présente. La distinction de cette pipistrelle est récente (1994-2005), ce qui implique un manque de données historique et la possibilité très limitée de pouvoir analyser l’évolution de ses populations. Elle est délicate à identifier en période d’hibernation, notamment par méconnaissance des localisations de gîtes où elle s’installe et de ses habitudes à préférer les fissures. De fait, très peu de données sont disponibles. Elle est mieux connue dans le cadre des colonies de reproduction qu’elle établit volontiers dans du bâti (vides sanitaires, sous-toitures). L’existence d’un SOS chiro sur la région (centralisé par le CEN Occitanie – antenne de Toulouse) a ainsi permis de découvrir plusieurs sites d’estivages en milieu bâti. La connaissance des gîtes arboricoles est beaucoup plus délicate. L’espèce fréquente aisément les gîtes artificiels qu’elle peut exploiter toute l’année (quelques cas d’hibernation ont été rapportés)

 

©Laurent Arthur

 

  • Le Murin à moustaches (Myotis mystacinus) fait partie d’un groupe de chauves-souris dont la distinction est complexe, tant sur les caractères morphologiques (variabilité des mensurations) qu’au niveau de ses cris d’écholocation. C’est une petite chauve-souris d’aspect brun sombre que l’on rencontre à travers toute l’Europe dans des milieux bocagers ainsi que dans les zones humides. Elle chasse le long des haies et des plans d’eau et cours d’eau, ce qui implique la forte attraction de la ripisylve pour cette espèce. Les colonies de reproduction peuvent être localisées dans les anfractuosités des bâtiments, des ponts ou derrière les écorces décollées. En hiver, l’espèce occupe des gîtes souterrains (mines, grottes, tunnels) mais également des ponts. Les données sont très fragmentaires sur cette espèce difficilement identifiable, bien qu’elle soit présente sur l’ensemble de la région. Sa spécialisation sur les corridors de type ripisylve connectés en fait une espèce très sensible à la fragmentation pour qui la reconnexion de l’ensemble du corridor garonnais avec ses bassins versant et une priorité.

 

 ©Laurent Arthur

 

Les mesures conservatoires

 

Plusieurs actions peuvent être mises en œuvre pour la préservation des chauves-souris. Sur la gestion des habitats comme les ripisylves, il est essentiel de conserver une part importante de vieux bois et de maintenir des formations naturelles (libre évolution). En outre, le maintien du tracé naturel des rivières et des zones inondables permet de garder une diversification des faciès, favorisant la ressource en insectes. Sur une plus grande échelle, le maintien des corridors arborés de type bocage avec alternance de surfaces en herbages offre des zones de chasses aux différentes espèces comme des axes de déplacements. Enfin, au niveau des gîtes, la protection des colonies d’estivage, surtout lors de la restauration des bâtiments, et d’hibernation (protection des grottes contre le dérangement) est un parallèle indispensable à la conservation des espèces. Le déploiement de gîtes artificiels peut être un accompagnement intéressant mais ne remplace pas la préservation des gîtes existants.  

 

En dehors des aires protégées, tout propriétaire privé peut protéger des habitats de chauves-souris (arbres à cavité, granges, etc…) en utilisant le dispositif peu connu des obligations réelles environnementales (ORE) qui permet aux propriétaires de biens immobiliers qui le souhaitent de mettre en place une protection environnementale sur leur bien, même après leur vente sur une durée pouvant aller jusqu’à 99 ans.

 

Dans le cadre des actions menées sur le grand site Natura 2000, les enjeux Chiroptères sont pris en compte pour justifier et adapter les travaux réalisés dans le cadre des contrats Natura 2000 comme par exemple le contrat N2000 du pont de Bioule à Saint-Nicolas-de-la-grave avec la conversion d’une peupleraie en boisement diversifié propice pour ces espèces ; Fiche n°15 du guide zones humides du SAGE vallée de la Garonne.

 

En véritable espèces parapluies, la préservation des habitas pour les chauves-souris est un gage de préservation des écosystèmes et des espèces qui y sont liées.

 

 

Pour aller plus loin :

 

Le réseau « SOS Chauves-souris » : www.sfepm.org/sos-chauves-souris.html

Le PNA Chauves-souris : Accueil | Plan National d'Actions Chiroptères (plan-actions-chiropteres.fr)

Les ORE : https://outil2amenagement.cerema.fr/les-obligations-reelles-environnementales-ore-r458.html 

 

 

Notre site ressources documentaires lagaronne.com
Le site du SAGE Garonne sage-garonne.fr
Syndicat Mixte d'Études & d'Aménagement de la Garonne
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