n°23 - Octobre 2022

BIENVENUE SUR LA VINGT-TROISIÈME ÉDITION

DES JEUDIS NATURA 2000 GARONNE EN OCCITANIE ! 

... 

Des nouvelles toutes fraîches du desman, symbole des cours d’eau pyrénéens

 

La saga de cet animal mystérieux et protégé, symbole des cours d’eau de montagne dans les Pyrénées, se poursuit grâce à la ténacité d’une équipe de chercheurs et de gestionnaires d’espaces naturels enthousiaste ! Présenté dans la fiche n°8 des jeudis Natura 2000 d’Occitanie, il s’agit aujourd’hui de faire un point d’étape sur la mise en place du deuxième Plan National d’Action (PNA) porté par le Ministère de la Transition Ecologique et de la Cohésion des Territoires, et confié au Conservatoire d’Espaces Naturels d’Occitanie (CEN Occitanie). Ce PNA a débuté l’année dernière et se poursuit cet automne. Voici les nouvelles toutes fraiches que nous vous proposons en exclusivité !

 

 

 

Pour bien protéger, il faut bien connaître…

 

C’est pour cela que l’un des objectifs du PNA 2 Desman est l’amélioration de la connaissance de cette espèce mal connue. En effet, sans certitude sur la période de reproduction, le comportement pendant l’élevage des jeunes, la compréhension fine du mode de vie et de déplacement des différents types d’individus au cours de leur vie. Mais aussi leurs ressources nécessaires et les menaces d’origine anthropique, il est bien difficile d’établir un processus de protection de l’espèce et de gestion des milieux l’abritant. Cela particulièrement dans un contexte de changement climatique.

Ce deuxième PNA (2021-2030) faisant suite à deux autres programmes (PNA 1 2010-2015 ; LIFE+ Desman 2014-2019 ), prévoit cinq grands objectifs qui s’articulent autour de trois grands domaines : la connaissance, la gestion et la sensibilisation. Au total, ce sont 12 actions qui seront déployées au cours des 10 prochaines années par l’ensemble des partenaires du plan.

 

Le Desman, espèce-cible pour mieux gérer les cours d’eau…



A l’instar de la Loutre d’Europe ou d’autres petits mammifères semi-aquatiques comme le Crossope aquatique et le Campagnol amphibie, l’enjeu de la conservation de l’espèce s’appuie sur une meilleure gestion des milieux aquatiques en limitant la pollution de l’eau et en prenant en compte l’animal dans les projets d’aménagements des cours d’eau. Les précédents programmes ont permis la réalisation de guides techniques ainsi que d’autres références bibliographiques (disponibles sur le site du Life) à destination du grand public et des acteurs de l’aménagement du territoire en zone de montagne : entreprises, collectivités, bureaux d’étude.

 

 

Pour une appropriation de tous les publics des enjeux de protection du desman et des milieux aquatiques

 

L’information du grand public et la formation du public professionnel (services de l’Etat, bureaux d’études en lien avec les acteurs de l’aménagement, élus et techniciens des collectivités locales et des structures GEMAPI) forment un duo indissociable pour faire évoluer le regard sur notre patrimoine naturel et les menaces qui pèsent sur lui, à la fois directement et dans le cadre des changements globaux dont le réchauffement climatique.

 

PNA 2 : le retour de la force pour la protection du Desman des Pyrénées !

 

En plus des thématiques déjà présentées et renforcées dans le cadre des précédents programmes, PNA 1 et LIFE+ desman déjà présentés dans la fiche n°8 des jeudis Natura 2000 d’Occitanie, deux objectifs complètent le dispositif déjà enclenché : le suivi sur des secteurs à enjeux forts et la coopération avec les structures partenaires étrangères.

 

Des secteurs clés définis comme prioritaires :

 

Certains secteurs se sont révélés être à forts enjeux pour le Desman des Pyrénées. Il s’agit de cours d’eau ou lacs d’altitude importants pour sa conservation, soit :

  • Parce qu’ils abritent des densités a priori élevées de Desman des Pyrénées et constituent alors des populations sources potentielles ;
  • À l’inverse parce qu’ils sont situés dans des secteurs où l’espèce semble en fort déclin voire non détectée depuis des années.

 

Les « secteurs clés » sont à protéger et à préserver en priorité. Sur les « sites sentinelles », plusieurs actions pourront être cumulées et des travaux pourront y être menés afin d’améliorer leur attractivité pour le Desman des Pyrénées (par exemple en diversifiant les habitats ou encore en supprimant certaines menaces susceptibles d’impacter les populations).

 

Le Desman n’a pas de frontières ! 

 

Il s’agira également de renforcer les liens avec les structures partenaires d’Andorre, d’Espagne et même du Portugal. Cet objectif fait suite au constat d’un manque de communication et de partage des connaissances à l’échelle transfrontalière. Ces échanges sont nécessaires pour une conservation à long terme du Desman des Pyrénées sur l’ensemble de son aire de répartition mondiale (France, Espagne, Andorre, Portugal). Les apports des précédents programmes de conservation du Desman des Pyrénées soulignent la nécessité de concentrer les efforts sur quelques sites prioritaires, que ce soit pour l’acquisition de connaissances ou pour la protection. A titre d’exemple, la multiplication des études et des moyens sur un même secteur permettra d’analyser plus finement les populations et l’impact des facteurs extérieurs à une échelle locale. Ainsi, la répétition de ces efforts sur plusieurs sites favorisera l’extrapolation à une échelle plus large.

 

Récit d’aventure de la séquence capture-radiopistage fin d’été 2022…

 

L’une des actions phares de cette année 2022 est la session de capture et de radiopistage du petit mammifère. C’est la 4ème session réalisée en Ariège après Aston en 2014 et 2015 et Vicdessos en 2019. Cette fois-ci, nous voulions focaliser l’étude sur un cours d’eau plus naturel, c’est-à-dire exempt d’hydroélectricité à l’inverse des deux cours d’eau précédents.

Nous voulons plus précisément améliorer la connaissance des us et coutumes du Desman dans son environnement. Plus précisément:

  • acquérir de nouvelles données sur sa biologie et alimenter notre savoir (temps d’activités et de repos, domaine vitale, nombre de gîtes)
  • acquérir des données sur son habitat, l’utilisation qu’il en fait et sur les ressources alimentaires (cartographie fine des faciès d’écoulement et des habitats de berges, caractérisation physico-chimique du cours d’eau, inventaire des macro-invertébrés benthiques, analyses génétiques de ses fèces sur les zones de chasses).

 

Comment fait-on ?

 

Tout d’abord on cible le cours d’eau adéquat en prospectant les fèces pour vérifier la présence du desman. Une fois que les fameuses sont trouvées (en faible quantité néanmoins), nous décidons d’orienter nos captures sur le cours d’eau de l’Orle, affluent rive droite du Lez. La session commence ! Le CEN Occitanie et l’ANA-CEN Ariège se mettent en route vers le dit-lieu le 19 septembre.

 

 

On déploie alors une cinquantaine de nasses (type verveux à poissons) dans le lit du cours d’eau en fin de journée. Attention pas d’appât ! La réflexion est de mise : se mettre dans la tête du desman pour anticiper ses déplacements et trouver les endroits du cours d’eau où il est le plus susceptible de passer et de se retrouver dans une nasse.

 

 

Une fois en place, c’est parti pour relever les nasses toutes les heures et demie, jour et nuit. Des équipes se forment pour se relayer et espérer impatiemment la capture de l’animal. Durant les temps morts, on se rappelle les premières captures jadis et les émotions de chacun lorsque l’on se retrouve nez à trompe avec l’animal. Ambiance chaleureuse, nourriture diverse et variée pour ravitailler les troupes entre deux sessions de relevés.

 

 

48h se sont écoulées et pas de trace du Galemys. Nous décidons alors de changer de site sur une rivière toujours affluent du Lez mais en rive gauche cette fois-ci, le cours d’eau de l’Isard. La même rengaine commence, installation des nasses réparties sur plus d’1,5 km de linéaire, nous sommes le 21 septembre, la journée se termine, les équipes sont prêtes pour la nuit, entre excitation et angoisse de finir bredouille. Dernière session de capture, nous sommes le 23 septembre à 5h du matin au plus froid de la nuit, l’équipe se remet en chemin pour les derniers relevés, quand soudain le cri d’un de nos prospecteurs fait palpiter les cœurs lassés. Il est là ! La trompe n’y trompe pas… Enfin un desman ! Le seul et l’unique mais enfin !

 

 

Toute l’équipe se rassemble autour de l’individu sous un laboratoire de fortune monté pour l’occasion : on le pèse, on le sexe, on lui regarde les dents (pour estimer l’âge), on lui prend quelques poils pour la génétique, on lui pose l’émetteur puis on lui rend sa liberté. Une petite jeune, appelée Molo (clin d’œil à MOna en service civique à l’ANA-CEN Ariège et à LOan débutant sa thèse sur l’espèce au CEN Occitanie). La voilà repartis comme-ci de rien au gré des courants.

 

 

Débute maintenant le radiopistage. Munis d’antennes et de récepteurs nous suivons la bête. Toutes les 10 minutes 24h/24 et pendant 9 jours consécutifs, nous repérons Molo dans son cours d’eau, nous localisons ses gîtes, ses zones de chasses, ses déplacements, et nous la voyons, pour les plus chanceux en tout cas, de temps en temps nous narguer. L’action s’est terminée le samedi 1er octobre pour la partie radiopistage. D’autres études de terrainvont débuter notamment sur les habitats et la ressource alimentaire. L’analyse de l’ensemble des données récoltées sera la prochaine étape, affaire à suivre donc.

 

© crédits photos : Vincent Lacaze & GREG

Notre site ressources documentaires lagaronne.com
Le site du SAGE Garonne sage-garonne.fr
Syndicat Mixte d'Études & d'Aménagement de la Garonne
61 rue Pierre Cazeneuve 31200 TOULOUSE
smeag@smeag.fr
Tél. 05 62 72 76 00